- Mar 26, 2025
- Envoyé par : Sébastien Bonneau

Le Québec, la dynamique société culturellement distincte du Canada, se trouve à un tournant alors que la province navigue dans une confluence de tendances qui influenceront son paysage politique. Nous croyons que la politique québécoise sera façonnée par des dynamiques croisées : le renforcement de son identité linguistique et culturelle, une transition accélérée vers une économie décarbonée, le recalibrage des stratégies fiscales et du travail dans un contexte de changements démographiques et de pressions budgétaires et son leadership dans les secteurs émergents, comme l’intelligence artificielle. Nous explorerons ces sujets plus en détail.
1. Identité et culture
Le débat politique du Québec a été historiquement défini par sa quête d’affirmation et d’autodétermination en tant que nation. Sous le premier ministre François Legault et le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ), l’accent est passé du débat sur l’avenir politique du Québec à la création de plus de richesse tout en cherchant une plus grande autonomie au sein du Canada. Les principaux enjeux de cet agenda sont les suivants :
Politique linguistique et implications
En tant que gouvernement de la seule société à majorité française en Amérique du Nord, la CAQ vise à renforcer son utilisation dans la province. La Loi 96 (2022) a suscité de vives discussions sur son aspect pratique, notamment pour les entreprises, ses effets sur les communautés minoritaires et ses implications pour la compétitivité économique du Québec dans un monde globalisé. Les partisans, cependant, le présentent comme un rempart contre l’érosion linguistique, citant le déclin de l’usage du français dans la société. Alors que le gouvernement cherche à protéger l’identité culturelle et linguistique de la province, d’autres discussions politiques sont attendues à ce sujet au cours des prochaines années. Dans un contexte de pression croissante de la société civile et des partis d’opposition pour préserver et promouvoir la langue française, les entreprises pourraient être davantage touchées.
Immigration et identité :
Alors que le paysage démographique du Québec devient de plus en plus diversifié, il fait face à de nouveaux défis. Les débats sur la politique d’immigration continueront donc d’être au cœur de la politique provinciale, étroitement liés aux efforts de protection et de promotion de la langue française et de l’identité culturelle. Le gouvernement de la CAQ cherche à trouver un équilibre délicat. Il veut répondre aux besoins du marché du travail par l’immigration, mais il veut aussi s’assurer que les nouveaux arrivants s’intègrent bien au tissu linguistique et culturel unique du Québec afin de maintenir le français comme langue commune. Le débat entourant l’immigration sera également influencé par les effets d’entraînement de la Loi 21 (2019) qui interdit les signes religieux pour certains employés publics, alors que le gouvernement cherche à renforcer la laïcité dans la province.
2. Transports, énergie et ressources naturelles
Au cours des cinq prochaines années, le Québec renforcera son leadership en matière d’environnement, en s’appuyant sur son statut de chef de file canadien en matière d’énergie renouvelable, grâce à son abondance de capacité hydroélectrique. À mesure que les changements climatiques s’intensifient, la province fait face à un élan croissant pour renforcer les efforts de durabilité dans des secteurs essentiels, comme le transport, l’agriculture et la construction, renforçant ainsi son rôle dans la transition mondiale vers un avenir plus vert.
Les transports et l’économie durable :
L’ambitieuse politique québécoise de mobilité durable, dont la mise en œuvre complète est prévue d’ici 2030, s’appuie sur des investissements de près de 10 milliards de dollars. Cette stratégie accorde la priorité aux améliorations transformatrices des infrastructures de transport en commun et de transport actif tout en menant l’électrification des véhicules personnels et commerciaux afin de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre.
Jumelé au plan de 90 à 110 milliards de dollars d’Hydro-Québec visant à accroître la capacité d’énergie renouvelable d’ici 2035, ouvrant la voie à un doublement de la production d’électricité d’ici 2050. Ces initiatives visent à décarboner son économie, en particulier dans les secteurs des transports et de l’industrie, à stimuler la croissance économique et à positionner le Québec comme un chef de file du développement durable sur la scène mondiale d’ici le milieu du siècle.
Énergie et ressources naturelles :
La facture annuelle de 2 milliards de dollars du Québec sur les importations de pétrole constitue un obstacle important à sa transition verte, en particulier dans le secteur des transports, où la dépendance aux combustibles fossiles mine le leadership de la province en matière d’énergies renouvelables. Cette dépendance met en évidence le besoin urgent d’investir davantage dans les solutions de rechange propres pour atteindre l’objectif de réduire de 40% la consommation de pétrole dans les transports en utilisant l’avantage des énergies renouvelables du Québec.
Pendant ce temps, la demande mondiale croissante de ressources naturelles et de minéraux critiques offre au Québec une occasion stratégique de jouer un rôle central. Grâce à son énergie hydroélectrique abondante et à faible coût, à ses solides capacités minières et à ses riches gisements minéraux, la province est bien placée pour devenir un fournisseur essentiel dans la transition énergétique. Le Québec vise à tirer parti de ces atouts pour créer des emplois, créer de la richesse et diversifier ses marchés d’exportation, tout en s’intégrant dans la chaîne d’approvisionnement à valeur ajoutée des produits en forte demande. Il s’agit notamment de batteries de véhicules électriques, d’aluminium propre et de solutions technologiques vertes innovantes, transformant son avantage en ressources en un catalyseur de croissance durable.
3. Changements démographiques, politique budgétaire et innovation économique
Le programme politique du Québec au cours des cinq prochaines années devra naviguer dans un paysage économique dynamique façonné par les changements démographiques, la demande croissante de soins de santé et l’innovation. Le vieillissement de la population de la province augmentera les besoins en soins de longue durée et en services médicaux, ce qui incitera à se concentrer stratégiquement sur le renforcement du système de santé et l’optimisation des finances publiques pour soutenir ses programmes et services sociaux robustes nécessitant un leadership pour favoriser des secteurs à forte croissance, comme l’intelligence artificielle.
Services de santé :
D’ici 2030, les dépenses de santé au Québec devraient atteindre près de 50% du budget provincial, en raison d’une population vieillissante et dynamique, qui devrait atteindre 23% de plus de 65 ans d’ici 2028. Avec la demande croissante de services, les efforts visant à réduire les temps d’attente aux urgences et la pénurie de personnel continueront probablement de dominer le discours public. La création récente d’une société d’État, Santé Québec, ayant pour mandat d’assurer un réseau de santé prévisible, efficace et durable, dans le cadre d’une réforme majeure de la santé, est la réponse du gouvernement de la CAQ, avec de nombreux éléments de la réforme à déployer.
Les discussions sur la privatisation des services de santé, ou la promotion de modèles hybrides public-privé et l’obtention de transferts fédéraux de santé plus importants façonneront les discussions sur les moyens d’améliorer les soins tout en respectant les capacités financières des contribuables. Ce changement marque l’occasion de déclencher des réformes novatrices dans la prestation de services et le financement qui pourraient ouvrir des portes à la prospérité des entreprises du secteur.
Pénuries de main-d’œuvre :
Avec 1,4 million de postes vacants prévus d’ici 2028, le Québec fait face à une grave pénurie de main-d’œuvre combinée au vieillissement de la population. Pour relever ce défi, la province devra revoir ses politiques d’immigration en simplifiant les processus visant à attirer et à retenir des travailleurs qualifiés de l’étranger tout en harmonisant les titres de compétences des nouveaux arrivants avec les besoins locaux dans un marché majoritairement francophone. L’accélération des investissements dans l’automatisation pour stimuler la croissance économique et accroître la productivité pourrait également être essentielle pour relever ces défis de main-d’œuvre. Cependant, le succès dépend de l’équilibre entre ces stratégies et les programmes de formation visant à améliorer les compétences des travailleurs existants, en veillant à ce que l’automatisation complète plutôt que de remplacer la main-d’œuvre, soutenant ainsi la vitalité économique du Québec en relevant les défis démographiques avec confiance.
L’IA en tant que secteur en croissance :
Si l’industrie minière, l’aluminium et l’industrie aérospatiale ou sciences de la vie demeureront des vecteurs de la croissance économique et de la stratégie industrielle du Québec, avec sa main-d’œuvre hautement qualifiée, elle s’impose rapidement comme une plaque tournante incontournable dans le secteur technologique mondial, avec un accent particulier sur l’intelligence artificielle (IA). Au cours des deux dernières années, la province a fait des progrès importants dans la recherche et le développement en IA, se positionnant comme un chef de file dans ce domaine, notamment avec plus de 140 millions de dollars d’investissements publics au cours des dernières années.
Le Québec représente maintenant 40% des talents en IA au Canada. Le pôle d’IA en plein essor de Montréal, ancré par des acteurs innovants comme Element AI, le réputé institut de recherche Mila, représente un secteur économique vital pour le Québec et le professeur Yoshua Bengio de l’Université de Montréal. Cet écosystème florissant, soutenu par un riche bassin de talents provenant d’universités locales et une communauté technologique collaborative, positionne la province comme un concurrent mondial en matière d’intelligence artificielle. Le potentiel du secteur technologique pour stimuler l’économie future du Québec est important, mais sa croissance dépend d’un soutien solide de politiques et d’incitatifs gouvernementaux ciblés. À cette fin, le gouvernement de la CAQ met en œuvre une stratégie visant à positionner l’administration publique comme un acteur exemplaire de l’IA, notamment en s’appuyant sur le leadership du Québec en la matière. Cependant, les préoccupations éthiques entourant l’IA, telles que la surveillance, les préjugés et la protection de la vie privée, resteront importantes dans les discussions et l’élaboration du public et des politiques.
Des investissements stratégiques en R-D, des crédits d’impôt pour les entreprises technologiques et des initiatives publicitaires visant à retenir et à attirer des travailleurs qualifiés amplifieront l’impact du secteur, compensant des défis comme la pénurie de main-d’œuvre et le vieillissement de la population pour financer les programmes et services publics. S’il est entretenu efficacement, cet élan impulsé par l’IA pourrait diversifier l’empreinte économique du Québec, stimuler la productivité et améliorer sa compétitivité sur la scène mondiale.
En conclusion
Le paysage politique du Québec au cours des cinq prochaines années reposera sur la sauvegarde de son identité culturelle et linguistique, l’accélération de ses ambitions environnementales et la promotion de l’innovation. Cette approche propulsera la province vers une économie carboneutre en stimulant sa croissance dans les secteurs émergents, comme l’intelligence artificielle, afin de faire face efficacement aux changements démographiques et aux pressions budgétaires. Ce faisant, le Québec répondra non seulement aux besoins actuels et futurs de ses citoyens, mais assurera également un avenir prospère et durable.
Source:
- Assemblée nationale du Québec – https://www.assnat.qc.ca
- CBC News – Politique québécoise – https://www.cbc.ca/news/canada/montreal
- Coalition Avenir Québec – https://coalitionavenirquebec.org
- La Presse – Politique québécoise – https://www.lapresse.ca
- Transporter le Québec vers la modernité – https://www.transports.gouv.qc.ca
- Vers un Québec décarboné et prospère – https://www.hydroquebec.com